Occupation de l’Âge du bronze à Dainville
La Communauté Urbaine d’Arras et la Commune de Dainville entreprennent la construction d’un éco-quartier rue Broussais, au lieu-dit "Le Champ Bel Air". Sur la base des prescriptions de l’État, une équipe de 10 archéologues de la Direction de l'Archéologie du Pas-de-Calais est intervenue de février à début avril 2012 pour fouiller une nécropole et un habitat de l’Âge du bronze (entre moins 2 000 ans et moins 800 ans).
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5500 ans avant l'éco-quartier de Dainville
La restauration en archéologie
Des monuments funéraires de 3 000 ans
La fouille du site de Dainville a permis de découvrir deux fossés circulaires de 18 et 25 mètres de diamètre, qui délimitaient un espace funéraire. Il y a 3 000 ans, le rite funéraire était l’incinération : les restes brûlés des défunts étaient déposés dans de petites fosses à l’intérieur de ces cercles funéraires. Les archéologues ont mis au jour trois de ces fosses. La terre provenant du creusement du fossé était déposée à l’extérieur pour former un talus. À l’intérieur de l'un des grands fossés circulaires, les archéologues ont découvert trois tombes contenant les cendres des défunts.
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Ce type de monument funéraire est connu. Ces dernières années, les archéologues ont mis au jour des architectures semblables à Dainville "Gérico" et à Marœuil. Il arrive parfois que des habitats gaulois (entre moins 800 ans et moins 52 ans) soient implantés à proximité, ce qui suggère que ces monuments étaient entretenus au fil des siècles et peut-être recouverts d’un tertre, donc visibles dans le paysage.
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Des habitants dès le 9ème siècle avant Jésus-Christ.
L’autre découverte du site est une zone d’activités domestiques, peut-être contemporaine de l’espace funéraire. Les archéologues ont découvert une quinzaine de structures de stockage : des greniers sur quatre poteaux porteurs et des fosses silos creusées dans le sol.
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Ces structures servaient à conserver les denrées alimentaires : des graines de céréales ont d’ailleurs été trouvées au fond des silos. Elles seront étudiées par un carpologue
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Par contre, aucune maison n’a été repérée. Ce mystère s’explique peut-être par un mode de construction qui n’a pas laissé de traces sur le sol actuel. Pourtant, il est certain que des hommes ont habité les lieux puisque beaucoup de mobilier en relation avec des activités domestiques a été abandonné. Il devait s’agir de paysans qui cultivaient, élevaient des animaux (porc, bœuf, chèvre) et consommaient également des animaux sauvages : des bois de cerfs découverts par les archéologues étaient utilisés pour fabriquer des outils.
L’étude des découvertes permettra de comprendre les rituels funéraires et l’organisation d’une population installée à Dainville depuis 3 000 ans.
Le mobilier varié découvert à l’intérieur des fosses de rejets domestiques, constitue une source d’étude très importante pour les archéologues : céramiques, ossements animaux, torchis, etc. seront analysés en laboratoire.
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Du fil au tissu, les traces d’une importante activité textile
Les archéologues ont également découvert de nombreux indices d’une activité liée à la fabrication des tissus. Une dizaine de fusaïoles, petites rondelles de terre cuite ou de craie percées en leurs centres, a été mise au jour. Elles étaient utilisées comme poids pour entraîner le fuseau et faciliter la fabrication du fil à partir de la matière première (animale ou végétale). D’autres objets attestent de la présence sur le site de métiers à tisser : les pesons en terre cuite. Leur fonction est de tendre les fils verticaux de la trame du tissu.
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Cette évocation de métier à tisser permet de comprendre le rôle des pesons (en bas du dessin) dans la fabrication du tissu.
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Ces éléments sont précieux pour comprendre les méthodes de fabrication des textiles que les femmes et les hommes devaient revêtir. Les tissus étaient fixés avec des épingles en bronze : les archéologues ont eu la chance d’en découvrir une lors de la fouille. Elle devait servir à maintenir les étoffes.
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Fouille de Dainville, sur le site du futur éco-quartier, rue Broussais.
Découvertes archéologiques :
- monuments funéraires : entre 1 500 et 1370 avant avant Jésus-Christ
- Zone d’Activités Domestiques : entre 920 et 810 ans avant Jésus-Christ
Vincent Merkenbreack, Archéologue, Direction de l'Archéologie :
On est sur un site funéraire avec deux fossés circulaires qui correspondent à des tertres, et qui délimitent un espace funéraire au sein duquel on retrouve une ou plusieurs tombes, des "crémations". C’est à dire que le défunt était brulé. On a retrouvé trois petites structures de crémation dans le plus grand cercle, mais relativement arasées avec très peu d’esquilles d’os. Le tertre est un marqueur dans le paysage, on voit la tombe de très loin, c’est assez imposant. La taille du tertre est proportionnelle à l’importance sociale de la personne enterrée.
On est aussi sur un site d’habitat : même si on a pas de traces de bâtiment, on a des structures de stockage, des silos, différentes fausses de rejets, et des traces de petits greniers sur piquets qui servaient aussi à conserver le grain.
On a retrouvé différents objets liés à la vie quotidienne classique de l’époque, c’est à dire des rejets de céramiques cassées, des éléments de métiers à tisser qui ne sont pas forcement reliés à de l’artisanat à grande échelle, mais plutôt pour une utilisation familiale élargie. Il s’agit essentiellement de pesons : des poids qui permettaient de tendre la laine. On a aussi retrouvé des fusaïoles (rondelles de terre cuite ou de craie) qui permettaient de tendre le fil avec un fuseau pour filer la laine.
On a des éléments liés à la consommation "classique" pour l’époque : des graines dans les silos, des ossements animaux comme du bœuf et aussi du cerf dont les bois montés sur un manche pouvaient être utilisés comme outil pour creuser le sol.
Les graines retrouvées dans les silos vont être tamisées et données à un carpologue, le spécialiste de l’étude des graines. Il va nous dire de quel type de céréales il s’agit. On aura donc une meilleure compréhension de type de culture et aussi du type de consommation de l’époque. À partir de ces résultats, on pourra déterminer la superficie mise en culture. Ce qui est intéressant ce n’est pas l’objet retrouvé en tant que tel mais l’étude qui va en découler.
Réalisation : Direction de la Communication, Vadim Gressier
- Dainville