- 4 ans.
- 1562 jours de guerre.
- 72 nationalités représentées et 73 millions de personnes mobilisées.
- 800 km de tranchées de la Belgique à la frontière suisse.
- Des populations et des territoires profondément marqués.
La Première Guerre mondiale est bien documentée par de nombreuses sources auxquelles les historiens font appel. La presse écrite, la photographie et la vidéo sont en pleine expansion à l’époque. Elles apportent des informations sur les combats et la vie sur le front mais elles sont à prendre avec précaution car elles font l’objet de propagande et de censure. Les archives militaires définissent des cadres réglementaires et documentent la stratégie militaire. Les documents et témoignages personnels se rapprochent du quotidien. Les récits personnels sont très nombreux, dans un contexte où le service postal se développe entre les soldats et leurs familles restées à l’arrière.
Encrier découvert à Camiers, camp d’entrainement et de convalescence britannique
Si la Grande Guerre est si bien connue, quel est l’intérêt de l’archéologie dans ce domaine ? Elle apporte un regard inédit sur la vie et la mort quotidiennes. Elle documente des aspects peu abordés dans les autres sources.
La vie quotidienne
L’archéologie permet d’approcher au plus près la vie quotidienne des soldats, sur le front et à l’arrière. Elle apporte la preuve que les soldats n’avaient pas tous l’équipement réglementaire et que nombre d’objets ont été récupérés et détournés de leurs fonctions d’origine.
Dans les tranchées de Baralle, pour pallier au manque d’hygiène, des bidons d’essence sont réutilisés comme récipients pour la toilette quotidienne. Photographie de fouille, Direction de l'Archéologie ; photographie d'archives, fonds documentaire A. Jacques
L’archéologie met au jour des objets qui renseignent sur les occupations des soldats. Entre deux batailles et lors des repos à l’arrière, les soldats fabriquaient des objets pour leurs loisirs, comme des instruments de musique, ou pour les échanger et les vendre.
Cet objet qui ne semble pas terminé a été découpé dans une plaque d’obus récupérée sur le front.
L’archéologie permet aussi d’établir avec précision les circuits d’approvisionnement et de ravitaillement ainsi que les réseaux d’échanges de différents produits, en particulier alimentaires.
Pot de marmelade découvert à Camiers. Produite par James Keiller et sa mère en Ecosse, à Dundee, depuis 1797.Il s’agit d’une marmelade d’orange. Sur le pot figurent les récompenses remportées par le produit au 19ième siècle pour sa qualité.
Enfin, l’archéologie complète les sources militaires quant à l’emplacement exact des tranchées et à leurs aménagements. Elle documente aussi les innovations en terme d’armes ou de stratégie.
Aménagement d’un foyer dans une tranchée près de Bapaume. Photographie de fouilles, Direction de l’Archéologie ; photographie d’archives, fonds documentaire A. Jacques
La mort quotidienne et le devoir de mémoire
La guerre a fait 2 880 000 morts sur le front ouest. Environ 20 % d’entre eux n’ont pas de tombe connue. Les archéologues sont donc, sans le vouloir, souvent confrontés à la découverte de squelettes. Ils contribuent au devoir de mémoire, en permettant de donner une sépulture décente aux combattants retrouvés lors des opérations archéologiques.
Ces squelettes incomplets découverts à Avesnes-les-Bapaume témoignent de la violence de la guerre.
Les plaques d’identité réglementaires et les boutons de manteaux sont des indices utiles pour identifier le soldat.
Ce soldat, dont le squelette disloqué a été découvert à Annay-sous-Lens, appartenait à l'infanterie française. C'est grâce à la mise au jour d'un bouton orné d'une grenade, symbole de ce corps d'armée, qu'il a pu être identifié.
Les archéologues apportent aussi leur regard sur des pratiques funéraires particulières en contexte de mort de masse.
Pour les progrès de l'archéologie en tant que science
L’archéologie de la Première Guerre mondiale est intéressante pour la discipline elle-même. Certains matériaux périssables, comme le cuir, sont parfois mis au jour cent ans après leur enfouissement lors de la guerre. L’étude de la dégradation des matériaux sur un siècle apporte un référentiel qui peut être utile pour d’autres périodes ou d’autres lieux.
La chaussure en cuir est partiellement conservée et toujours en place sur le pied du défunt, dont le squelette incomplet a été découvert à Annay-sous-Lens.
Quelques objets et leurs histoires
La baïonnette est une arme blanche qui se fixe sur le canon d’un fusil. Elle sert au combat au corps-à-corps. Le modèle est différent selon les nationalités ; celle-ci est allemande.
Le téléphone était présent jusque dans les tranchées de première ligne. Le fil téléphonique était tiré sur de longues distances, supporté par des isolateurs en faïence sur support en métal comme celui-ci. D’autres, encore en place, sont visibles à la carrière Wellington à Arras.
Ce masque à gaz est encore rangé dans sa boite d’origine.
Ces tasses siglées "YMCA" renvoient à l’établissement du même nom, installé à Camiers ou dans les environs. Espace de divertissement et de ressourcement spirituel, le foyer des "Young Men Christian Association" mettait des livres et des jeux à disposition des soldats.
Ce récipient de la marque Horlick's contenait une formule à base de lait enrichi, utilisé comme substitut à un repas complet. La marque existe toujours aujourd’hui et propose des compléments alimentaires.
Ces bouteilles de limonade, au cul bombé, étaient conservées à l’horizontale et consommées rapidement.
Pour en savoir plus
- L’archéologie de la Grande Guerre. Y. Desfossés, A. Jacques, G. Prilaux. Editions Ouest France. 2008
- https://www.inrap.fr/dossier-actualite/l-archeologie-de-la-grande-guerre
- http://archeologie1418.culture.fr/