Le Département du Pas-de-Calais aménage la déviation Béthune - Bruay-la-Buissière. Sur la base des prescriptions de l’État, une dizaine d’archéologues de la Direction de l’Archéologie est intervenue de septembre à novembre 2009 pour fouiller des vestiges présents sur une partie du tronçon, un promontoire dominant la vallée à 80 mètres de haut.
Une forte implantation gallo-romaine
A l’époque gallo-romaine, l’entrée de la vallée de la Lawe, englobant Ruitz et Bruay-la-Buissière, était encadrée par deux voies de circulation : Arras-Thérouanne à 4 km au sud et le "chemin du Pire" à 2 km au nord, comme le montre la carte des voies romaines connues au premier siècle.
Ruitz s’inscrivait dans un territoire dynamique par le rayonnement de l’important centre de production de céramiques de Labuissière. Ces ateliers ont amené une installation de populations, ainsi qu’une organisation économique impactant les territoires voisins.
Il n’est donc pas étonnant qu’une villa gallo-romaine et qu’un pôle funéraire du début du 1er siècle se soient implantés à proximité.
Un temple dominant la vallée
Dans un premier temps, le site de Ruitz a accueilli une zone d’habitation, au tout début de l’époque gallo-romaine (première moitié du 1er siècle). En effet, un réseau de fossés partiellement conservé et très perturbé par des transformations ultérieures suggère une activité liée à l’habitat.
Mais la découverte majeure est d’ordre cultuel. Un temple gallo-romain ( fanum), inspiré des lieux de culte gaulois a été édifié au début du 2ème siècle, à proximité de la frontière des territoires de deux tribus gallo-romaines : les Atrébates et les Morins.
Le bâtiment se compose de deux carrés imbriqués l’un dans l’autre : la cella et la galerie. La cella abritait la ou les statues des divinités. La galerie de déambulation permettait aux fidèles de déposer des offrandes, et de prier en procession. Le temple s’inscrit dans une cour (téménos), séparée de l’espace profane par un mur (péribole).
Deux petits édifices carrés à la fonction inconnue ont également été mis au jour. Le premier, situé dans l’enceinte sacrée, pourrait être interprété comme une cella simple dédiée à un dieu secondaire. La fonction du second petit bâtiment, placé à l’extérieur, reste obscure. Aucun indice au sol ne nous permet d’aller plus loin dans l’interprétation.
Parmi le matériel mis au jour, une broche en forme de poisson datant des Ier - 2ème siècles a été découverte par les archéologues.
Une exploitation médiévale à ciel ouvert
Le temple semble être laissé à l’abandon à la fin du 2ème siècle. Mais des indices laissent penser qu’il est exploité jusqu’au Moyen-âge… en tant que carrière de pierre ! En effet, la forte croissance démographique du 12ème siècle, ainsi que l’emploi plus fréquent de la pierre dans la construction des bâtiments à l’époque médiévale, peuvent expliquer l’état de mauvaise conservation du sanctuaire.
Plusieurs blocs de grès, formés naturellement par consolidation de sable, ont été découverts sur le site. Les archéologues ont également mis en évidence des zones ayant probablement servi à débiter les plus gros blocs sur place. Le démantèlement du temple et la présence de fosses d’extraction de grès rose confirment la réutilisation des blocs de maçonnerie antique et l’exploitation du substrat local débité sur place à l'époque médiévale.