Le diagnostic archéologique des parcelles AB 273/275 (code patriarche 159043) et AB 276 (code patriarche 159042), au 14 rue de Saint-Omer à Thérouanne, conduit par la Direction de l’Archéologie du Pas-de-Calais du 2 au 6 novembre 2020, a concerné toute l’emprise vouée à deux projets distincts de construction de pavillon, soit 2281 m². L’opération est localisée en plein cœur de l’antique cité de Tervanna chef-lieu de la Cité des Morins, et en plein cœur de la Vieille Ville médiévale et moderne de la cité épiscopale, entre la rue Saint-Jean et la rue de Saint-Omer. Cette dernière figure l’emplacement du terre-plein interne de l’enceinte fortifiée de la ville. Les parcelles concernées se trouvent à proximité de vestiges des époques romaine, médiévale et moderne qui ont été mis au jour ces dernières années (Blamangin et al. 2011) et jusqu’à très récemment (Merkenbreack et al. 2020). Une fouille est d’ailleurs en cours au moment de la rédaction de ce rapport au sein des parcelles AB186/257. Quatre fenêtres d’observations ont été ouvertes sur l’emprise représentant 11,6 % de la surface accessible (et 4,8 % de la surface totale).
La stratigraphie observée, d’une forte densité comme on peut s’y attendre au sein de la Vieille Ville, s’échelonne de l’Antiquité à la période moderne. Les vestiges apparaissent directement sous la terre végétale ; cette dernière étant très épaisse en fond de parcelle à l’est (parcelle AB 276), de l’ordre de 1,40 m, et de l’ordre de 1 m pour le reste de l’emprise.
Le diagnostic a livré un niveau pouvant s’apparenter à une rue qui, si cela venait à être confirmé, serait alors perpendiculaire au cardo mis au jour plus à l’ouest en 2019 au sein de la parcelle AB 186 (Merkenbreack et al. 2020). Pour la période romaine, la découverte notoire réside en la mise au jour d’une construction dotée d’un portique qui semble correspondre à une vaste domus urbaine axée sur le cardo maximus mentionné précédemment. L’intérêt pour la période antique est également le fait qu’aucune construction postérieure n’est venue s’installer en lieu et place ce qui de facto rend accessible pour l’archéologie un large secteur au cœur même de la capitale des Morins.
Pour les périodes médiévale et moderne, les parcelles AB 273/275 et 276 n’ont livré que peu de vestiges, sous la forme de fosses, dont une a livré un lot détritique important de céramique d’usage domestique. Ainsi, et cela est confirmé par la vue cavalière de 1539, les parcelles concernées par le présent diagnostic sont des terres de jardins durant cette période. Le fond de ces parcelles à l’est aboutit sur la levée de terre interne, le terre-plein du rempart. Ce secteur n’étant pas bâti aux époques médiévale et moderne à Thérouanne, cela explique très probablement la raison du fort pendage desdites parcelles selon un axe ouest-est et la cote d’apparition très haute des vestiges romains qui sont alors préservés directement sous les niveaux de jardins.
Une fois de plus l’héritage archéologique de Thérouanne, riche, complexe et passionnant, s’offre à nous avec la possibilité présentement d’aborder un pan de l’urbanisation du caput civitatis Morinorum intra-muros et de compléter un peu l’histoire de cette ville captivante devenue un paisible village de l’Audomarois.
Vincent Merkenbreack
Merkenbreack (V.), avec la collaboration de Afonso-Lopes (E.), Agostini (H.), Meurisse-Fort (M.),
Thérouanne, parcelles AB 273, 275,14 rue de Saint-Omer,
Rapport final d’opération de diagnostic, édition Direction de l’Archéologie du Pas‑de‑Calais, Dainville, 2021, 166 pages, 96 figures.