Archéologie - Pas-de-Calais le Département
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Thérouanne, RD 341, rue de Saint Jean, rue du Marais, chemin d'Upen, Grand'rue, réseau électrique souterrain, 2019, diagnostic

Le diagnostic archéologique de la RD341 qui consistait à suivre les travaux d’enfouissement de réseaux en différents lieux de Thérouanne (rue Saint Jean, rue du Marais, chemin d’Upen et Grand’Rue), a été conduit par la Direction de l’Archéologie du Pas-de-Calais sur une période de 3 mois (entre mai et juillet 2019). Il s’est révélé positif principalement pour la Vieille Ville, à savoir pour l’actuelle rue Saint-Jean, la rue de Boulogne et la voie communale qui fait la jonction entre ces dernières.

Les conditions d’intervention étaient tout à fait particulières et les observations se sont révélées limitées en raison de l’exiguïté des tranchées réalisées et de leur accessibilité selon les secteurs. Limités en profondeur, de l’ordre de 1 m au maximum (en dehors de la tranchée réalisée sous le fossé bordier de la rue de Boulogne), les sondages ont livré de nombreux niveaux de remblais et au moins un niveau de voirie probablement de l’époque moderne faisant écho aux investigations réalisées en 2017 sur le bas de la rue Saint-Jean (Merkenbreack 2017). En dehors de la rue Saint-Jean et de ses états antérieurs, plusieurs éléments de maçonneries (fondations et élévations) ont pu être caractérisés et ce pour trois périodes chronologiques distinctes : l’époque romaine, le Moyen Âge et la période moderne.

Le distinguo entre les vestiges du Moyen Âge et de la période moderne n’est pas chose aisée dans les présentes conditions d’intervention et du fait de la pérennité potentielle des éléments bâtis entre le bas Moyen Âge et la date fatidique de 1553 qui met fin à l’existence de Thérouanne. L’opération de diagnostic est ici une occasion inédite d’acquérir des informations pour ce secteur de la Vieille Ville qui n’est pas encore documenté par l’archéologie (en dehors de la cathédrale). Ainsi, pour le domaine civil, plusieurs fondations d’habitation ont été mises au jour le long de la rue de Boulogne et celles-ci semblent axées sur cette voie. Dans un autre domaine, et vraisemblablement à mettre en relation avec le quartier épiscopal, d’autres maçonneries ont été observées, dont une conséquente (de 1,43 m de large), dont l’un des parements est constitué de briques. Ce mur avait en réalité déjà fait l’objet d’observations archéologiques dans le cadre d’une « fouille » en 1993 dont nous n’avons malheureusement qu’une notice au sein du Bulletin scientifique régional et un dessin de l’un des murs de la cave concernée (Barbé, Barret 1993). Ce bâtiment cossu (cave à voûtes d’ogives et édifices à pans coupés) a également été appréhendé en partie lors du diagnostic réalisé en 2009 par Benoît Leriche au sein de la parcelle AB28 directement au sud de la voie communale (Leriche 2009). Au regard des différentes observations réalisées dans le cadre de ces trois opérations, il est plus qu’envisageable d’associer cet édifice au palais épiscopal jointif de la cathédrale. En revanche, pour ce qui est de connaître la nature exacte de ce bâtiment ce n’est pas chose aisée. Pour tenter l’enquête dans le cadre de ce rapport, nous pouvons faire appel aux différentes iconographies connues de Thérouanne. Sur certaines d’entre elles sont figurées plusieurs édifices à proximité immédiate de la cathédrale et notamment le palais épiscopal mais également l’hôpital souvent figuré avec un clocher. Le mur que nous avons mis au jour ici et dont une partie des vestiges a également été observé en 1993 et en 2009 est donc probablement l’un de ces deux bâtiments.

L’autre découverte inédite du présent diagnostic est la mise au jour d’un mur en opus vittatum encore en élévation et attribuable à la période romaine. Quasiment parallèle à l’actuelle rue de Boulogne, cette maçonnerie appartient assurément à la sphère des bâtiments publics de l’ancienne Tervanna. Cela remet sur le devant de la scène une nouvelle fois la question de l’emplacement des différents édifices publics du chef-lieu de la cité des Morins. Si l’on admet une certaine résilience pour les éléments structurants forts (voies, enceintes, bâtiments publics), l’attribution au domaine public pour la maçonnerie 55 découvertes le long de la route de Boulogne est assurée. Sommes-nous en présence de l’un des éléments du forum par exemple ? L’indice est trop maigre pour l’affirmer. La question restera ouverte tant que l’archéologie sous toutes ses formes n’aura pas apporté de preuves suffisantes.

L’opération de diagnostic de la RD 341, originale par sa forme, n’en demeure pas moins d’une grande richesse pour la connaissance de l’histoire de Thérouanne. Finalement peu importe la taille ou la forme car toute opération archéologique au sein de la capitale des Morins apporte son lot d’informations inédites et suscite à chaque fois de nombreuses réflexions. Ce diagnostic met en lumière une fois encore la nécessité de continuer le travail mené dans le cadre du Projet Collectif de Recherche « Thérouanne, ville antique et médiévale » et notamment l’intérêt non négligeable que susciterait la mise en place d’un système d’informations géo référencées reprenant toutes les données issues de l’histoire, de l’archéologie préventive et des prospections pour une meilleure valorisation de la ville passée et future.

vue des relevés au bord de la route.

Référence du rapport

MERKENBREACK (V)

Thérouanne, RD 341 (rue de St Jean, rue du Marais, chemin d’Upen, Grand rue) », Réseau électrique souterrain,

Rapport final d’opération de fouilles/diagnostic, édition Direction de l’Archéologie du Pas‑de‑Calais, Dainville, 2019, 124 pages, 64 figures.